Le Conseil supérieur de la justice : un modèle original et une activité inlassable

par Nadia De Vroede - 4 février 2011

Le Conseil supérieur de la justice : un modèle original

Le Conseil Supérieur de la justice répond à un modèle tout à fait particulier : organe constitutionnel ne dépendant ni du pouvoir exécutif, ni du pouvoir législatif, ni du pouvoir judiciaire ; organe composé de manière pluridisciplinaire : magistrats, avocats, professeurs d’université, représentants de la société civile.

Le contexte de la création du Conseil supérieur de la justice est connu et Christine Matray l’évoque dans l’autre article : il répond à la volonté de restaurer la confiance des citoyens dans la justice.

La transparence dans la sélection et la nomination des magistrats

Le premier moyen d’action donné au Conseil supérieur de la justice pour atteindre son objectif est la maîtrise de la sélection et de la nomination des magistrats. Désormais, l’accès à la magistrature est régi par une procédure de sélection transparente. De l’ordre de 500 jeunes juristes participent annuellement à un concours d’admission au stage judiciaire, porte d’accès à une carrière dans la magistrature. Les juristes plus expérimentés ont, quant à eux, la possibilité de présenter un examen d’aptitude. Ils sont 480 environ à le présenter chaque année.

La recherche de l’objectivité règne également dans la politique de présentation des magistrats. Des avis sont demandés aux autorités judiciaires et au barreau. Le Conseil supérieur de la justice entend les candidats et procède à une comparaison des mérites de chacun, avant de prendre une décision motivée, communiquée aux différents candidats. En dix ans, les commissions de nomination du Conseil supérieur de la justice ont examiné ainsi plus de 13.000 candidatures à près de 3.400 places vacantes et présenté plus de 2.600 candidats.

Il n’y a aucune autosatisfaction dans le constat dressé ci-dessus. Au contraire, le Conseil supérieur de la justice n’a de cesse d’améliorer la transparence dans son travail et la qualité de ses présentations. Des réflexions sont menées sur des sujets comme la réforme du stage judiciaire, la durée de la procédure de nomination, la nature même des compétences exigées des magistrats. Dans cet esprit, par exemple, des tests psychologiques ont été insérés aujourd’hui, à titre expérimental, dans l’examen d’aptitude.

Un droit de regard sur le fonctionnement de l’appareil judiciaire

Le Conseil supérieur de la justice exerce un contrôle externe sur le fonctionnement de l’appareil judiciaire. Il reçoit les plaintes qui concernent le fonctionnement de la justice. Plus de 3.500 plaintes ont été ainsi reçues et traitées par les commissions d’avis et d’enquête. Le Conseil supérieur de la justice ne se limite pas à traiter ponctuellement les plaintes. À partir des constatations opérées, ses commissions d’avis et d’enquête formulent des recommandations à caractère général. Pas moins de 27 recommandations ont été ainsi rédigées et adressées aux juridictions ou parquets, ainsi qu’au ministre de la Justice.

Ces missions contribuent directement à une amélioration au quotidien du fonctionnement de la justice.

La réalisation d’enquêtes particulières et d’audits constitue un autre moyen pour le Conseil supérieur de la justice d’exercer sa mission de contrôle. Dix audits et enquêtes particulières ont été ainsi menés. Ils ont permis souvent le déclenchement positif d’une amélioration de l’organisation et du management des juridictions ou parquets concernés. Plus fondamentalement, les audits permettent au Conseil de jouer un rôle d’appui et de stimulant auprès de l’organisation judiciaire, en mettant en exergue, par exemple, les bonnes pratiques. C’est pourquoi le Conseil supérieur de la justice souhaite développer à l’avenir ses missions d’enquête et d’audit.

Émettre des avis sur ce qui concerne la justice

Le Conseil supérieur de la justice remplit enfin une fonction d’avis sur les différents projets ou propositions de loi qui ont une incidence sur le fonctionnement de l’ordre judiciaire. En dix ans, le Conseil supérieur de la justice a rendu 68 avis d’initiative ou à la demande du ministre de la Justice et du Parlement. Parmi les derniers avis rendus, on peut citer un avis sur la réforme de la cour d’assises, sur la création du tribunal de la famille ou celui sur les suites de l’arrêt Salduz de la Cour européenne des droits de l’homme (droit à l’assistance d’un avocat dès les premières phases de l’enquête pénale).

Le Conseil supérieur de la justice souhaite renforcer l’impact de ses avis sur le processus législatif, en défendant ses avis au Parlement et en obtenant d’être consulté plus tôt dans le processus législatif.

Participer aux réformes

Une réforme en profondeur du paysage judiciaire s’annonce aujourd’hui. Par sa place particulière en Belgique, par sa composition mixte, par l’ouverture à l’international que lui assure la place importante qu’il occupe dans le réseau européen des Conseils de justice, le Conseil supérieur de la justice est à même de jouer un rôle important dans la préparation de la réforme.

Le Conseil supérieur de la justice estime également que le temps est venu de réfléchir à un renforcement de son rôle et de ses missions, pour lui permettre d’exercer ses compétences avec une efficacité confortée. Il est également demandeur de compétences nouvelles, comme en matière disciplinaire, qui sont un prolongement naturel de ses missions actuelles.

Le Conseil supérieur de la justice souhaite enfin que la réforme annoncée accorde à l’organisation judiciaire l’autonomie de gestion dont celle-ci a besoin. Cette autonomie de gestion exige cependant un modèle de gestion transparent et actif, dans lequel un organe indépendant constituera la structure faîtière de l’organisation judiciaire.

Le Conseil supérieur de la justice est prêt à exercer cette responsabilité, à l’instar d’autres conseils de justice européens.

Mots-clés associés à cet article : Conseil supérieur de la justice,

Votre point de vue

  • Ingeveld Aimée
    Ingeveld Aimée Le 18 juin 2011 à 00:49

    Bonjour,
    Les dénis et les erreurs - voulues - sinon les protectionnismes, les menaces et les collusions sont fréquentes en Justice.
    J’aurais beaucoup à dire à ce sujet, non seulement sur certaines affaires, mais aussi sur le fonctionnement des cours de Justice en général.
    Je demande à être entendue dans cette optique.
    Bien à vous.

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Nadia De Vroede


Auteur

Substitut du procureur général près de la cour d’appel de Bruxelles
Coprésidente du Conseil supérieur de la Justice

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