La transaction pénale : éclairage d’un aspect du « Kazakhgate »

par Antoine Leroy - 26 décembre 2016

Justice-en-ligne a évoqué déjà le « Kazakhgate », c’est-à-dire le débat politique qui entoure les conditions dans lesquelles une transaction pénale a été accordée, voici quelques années, à un homme d’affaire belge d’origine kazakh, M. Chodiev. Un texte de loi avait été adoptée à cette occasion élargissant les possibilités de transaction, et ce dans des conditions qu’une commission d’enquête parlementaire récemment installée, évoquée par Justice-en-ligne , devrait éclaircir.

Mais qu’est-ce qu’une transaction pénale ?

Antoine Leroy nous l’explique, en compléments à un précédent article publié sur ce sujet par Justice-en-ligne en 2014 (Benjamine Bovy, « La Justice propose des transactions dans les affaires Ecclestone et Bois Sauvage : comment fonctionne la transaction pénale en droit belge ? » ). Depuis cet article en effet, un important arrêt de la Cour constitutionnelle est intervenu en 2016.

1. Depuis quelques temps déjà, et avec une acuité certaine ces dernières semaines, le principe de la transaction pénale suscite questions et controverses.

Le mécanisme est pourtant ancien et tout automobiliste un peu distrait ou pressé a déjà eu l’occasion de le mettre en œuvre. Depuis 1935, la transaction était ainsi proposée par le parquet à l’auteur présumé d’une infraction en répression de laquelle seule une amende était envisagée. N’étaient concernés que les délits et les contraventions (c’est-à-dire les infractions pour lesquelles la loi ne prévoit pas de peines supérieures à cinq ans de privation de liberté) et cette solution ne pouvait être envisagée qu’au stade de l’information préliminaire, soit à un moment où aucune procédure devant la juridiction compétente n’était encore enclenchée.

2. La loi du 14 avril 2011 ‘portant des dispositions diverses’, via un amendement déposé en commission des Finances et du Budget de la Chambre des représentants, a totalement révolutionné la matière.
Cette disposition a été adoptée dans une certaine précipitation, à un point tel qu’avant même son entrée en vigueur, un projet de loi correctrice avait été déposé et était devenu la loi du 11 juillet 2011.

3. En application de l’article 216bis du Code d’instruction criminelle, inséré par ces deux lois, la transaction est possible dès que le parquet estime qu’il ne devrait pas requérir une peine supérieure à deux ans d’emprisonnement, ce qui élargit considérablement le champ d’application de ce mécanisme. Ainsi, tous les faits susceptibles d’être punis d’une peine maximale de 20 ans d’emprisonnement peuvent théoriquement donner lieu à une transaction pénale. C’est la première condition fixée.

La deuxième condition est que les faits en cause ne constituent pas une atteinte grave à l’intégrité physique. De simples coups et blessures sans circonstance aggravante paraissent ainsi permettre une transaction, tout comme un vaste carrousel tva ou tout délit financier qui, par définition, n’implique aucune agression physique.

Troisièmement, il faut que la victime ait été indemnisée, à tout le moins pour la partie non contestée de son dommage. Si elle ne l’a pas été intégralement, le fait d’accepter la transaction implique pour l’auteur qu’il reconnait la faute, un débat pouvant encore avoir lieu ultérieurement au sujet du préjudice subi et du lien causal entre celui-ci et la faute. Des règles particulières sont prévues pour les administrations fiscales et sociales, qui sont en droit d’exiger le paiement préalable intégral des sommes qui leur sont dues.

4. Le bouleversement majeur induit par ces lois de 2011 est ailleurs : depuis lors, la transaction peut intervenir à tout stade de la procédure, alors que, précédemment, dès qu’un juge était saisi, la transaction était exclue.

Ainsi, une transaction peut être conclue avec le parquet alors qu’une instruction est en cours, que le tribunal correctionnel est déjà saisi ou même en degré d’appel, après que le prévenu ait été déclaré coupable.

En d’autres termes, une transaction était possible jusqu’au jour où la dernière décision rendue au pénal n’était plus susceptible de recours.
La loi du 5 février 2016, dite « Pot-Pourri 2 », a sensiblement limité cette faculté : désormais, il n’est plus possible de transiger lorsqu’un jugement au fond a été rendu. En d’autres termes, sauf quelques exceptions techniques, la transaction n’est plus possible en degré d’appel, après une condamnation en première instance.

Enfin, le juge du fond, tout comme le juge d’instruction, n’exerce aucun pouvoir de contrôle puisque la transaction est négociée et conclue directement entre le suspect et le parquet. Le juge du fond est simplement informé, le cas échéant à l’audience, qu’une transaction est intervenue, sans qu’il ne doive l’homologuer et sans même qu’il ne puisse en connaitre les conditions.

5. C’est cette dernière particularité qui a amené la Cour constitutionnelle à rendre un arrêt n° 83/2016 (cfr document PDF ci dessous), le 2 juin 2016 , dans lequel elle a considéré que le nouveau régime de la transaction pénale heurte les principes d’égalité et de non-discrimination, le droit à un procès équitable ainsi que le principe de l’indépendance du juge en ce qu’il permet au parquet de mettre fin à l’action publique, après l’engagement de celle-ci, sans qu’existe un contrôle juridictionnel effectif.

En d’autres termes, la Cour constitutionnelle estime qu’une transaction pénale ne peut être conclue lorsqu’une instruction est ouverte ou lorsque le juge du fond a été saisi, sauf à prévoir un contrôle par la juridiction d’instruction, dans le premier cas, et par le tribunal saisi, dans le second.

6. À défaut de modification législative intervenue, certaines juridictions d’instruction ont ainsi été amenées à « contrôler » des transactions intervenues entre un suspect et le parquet.

Celles-ci peuvent bien évidemment toujours être conclues, sans le moindre contrôle juridictionnel, au stade de l’information judiciaire.

Il se dit cependant dans les couloirs du Palais que le parquet se montre fort prudent depuis le prononcé de cet arrêt, et encore davantage après les révélations récentes relatives à l’affaire Chodiev ayant donné lieu à l’une des toutes premières (nouvelles) transactions.

7. Même si elle ne parait plus très la mode, une transaction présente l’avantage pour l’État d’engranger avec certitude des ressources financières puisque l’on sait que les amendes et confiscations prononcées par un juge sont rarement exécutées, et d’éviter de longues enquêtes suivies de longues procédures, ainsi que les risques de prescription. L’indemnisation de la victime est, si pas acquise, grandement facilitée. Pour la personne poursuivie, l’intérêt est de mettre un terme à des poursuites, à des conditions négociées et donc acceptées, sans que ne figure la moindre trace dans l’extrait de casier judiciaire.

8. Une justice pour les riches ?

Certes, le régime de la transaction pénale a été revu notamment pour offrir un outil supplémentaire dans le cadre de la lutte contre la délinquance financière. Mais des transactions sont aussi conclues pour des délits de droit commun, en fonction de la politique des parquets et des initiatives prises par la défense.

Quelle que soit l’infraction en cause, il reste évident que ceux qui, confrontés à la justice pénale, sont en mesure de mobiliser des moyens financiers substantiels, ont davantage de chances d’obtenir de bons résultats.

Votre point de vue

  • goffi
    goffi Le 27 janvier 2017 à 06:54

    je ne suis pas nantis ,mais je paye toutes les transactions a credit fait
    la je na i plus de droit de credit ,et une nouvelle transactions ne me permentent plus de payer un loyer
    je voie donc la rue ,ma famile ce demerdera bien ,la prostitution est tolerer et la transaction en nature aussi ,les garcon serons ou politiciens ou dealeur suivant leur possibilite
    moi sous un pont de gare ou dans un camp de sans papier on est mieux et vite servi
    sans papier sans passer ,un cpas me donnera atant que le chomage avec plus davantage en gratuité,en soin en nouriture en taxes entout au fond
    la societe est ou paria ou riche ,je serais donc ce mendiant qui est representer devant l entrer des chateaux fort qui savais acceuillir ses pauvres gueux crée par eux pour leur servir ,s offrit un droit de cuissage ,de vie et de mort

    Répondre à ce message

  • Nadine Goossens
    Nadine Goossens Le 1er janvier 2017 à 13:57

    « Depuis cet article en effet, un important arrêt de la Cour constitutionnelle est intervenu en 2016. »

    Bien évidemment que c’est choquant à lire !

    Mes droits - ceux d’un justiciable ordinaire - ont été copieusement piétinés, bafoués pendant les six années d’une procédure judiciaire insensée, absurde, où l’état de droit a été profané par une Institution qui a fait le choix de se prostituer.

    De quoi parle-t-on sinon d’une zone dévastée, inaccessible, d’un terrain miné où s’affrontent belligérants peu scrupuleux voire crapuleux, avocats, officiers ministériels et magistrats déloyaux ?

    Comment pouvoir imaginer qu’au XXIème siècle, l’Institution judiciaire belge que j’ai été contrainte d’explorer, est constituée de petites baronnies dominées par une personnalité localement influente, animée du seul désir de se faire justice elle-même, avec comme bouclier revendiqué, la déontologie surannée d’un Code transgressé par tous. Un séisme judiciaire.

    Mon audace à afficher les plans d’un édifice aujourd’hui en ruine n’a d’égal que leur certitude à tous (toutes) que rien ne sera jamais tenté contre eux.

    "La ruine est une chose. Le vide infect installé désormais au revers de ces murs une autre chose" (la nuit tombée/Antoine CHOPLIN).

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  • Amandine
    Amandine Le 27 décembre 2016 à 19:50

    Un grand merci pour cet article.
    A propos du point 7 : en ce qui concerne les amendes et confiscations prononcées par un juge, qui est chargé de les faire exécuter et pourquoi diable ne sont-elles que rarement exécutées ?
    Et qu’est-ce qui garantit qu’en cas de transaction pénale, il en irait autrement ? Car , d’après l’un de vos précédents articles, la transaction pénale "est une procédure qui permet au ministère public de proposer à l’auteur d’une infraction, dans le respect de certaines conditions, de mettre fin aux poursuites pénales engagées à son encontre moyennant le paiement d’une certaine somme d’argent au profit de l’État." Qui va, dans le cadre d’une transaction pénale, se charger de vérifier que le paiement de cette "somme d’argent au profit de l’Etat" est bien opéré ? Et si, dans le cas du Procureur, c’est possible, pourquoi n’en irait-il pas de même quand une amende est prononcée par un Juge ?

    D’une manière générale, il me semble qu’avec la transaction pénale, on fait l’impasse sur le rôle du juge, chargé de juger après des débats contradictoires, et cela en audience publique ; et l’on se rapproche d’un système de négociations secrètes, système dans lequel ceux et celles qui ne disposent pas des connaissances subtiles du droit nécessaires pour bien marchander, risquent de mal s’en sortir. Il vaudrait mieux allouer à la justice le budget dont elle a besoin, plutôt que de détourner d’elle une partie des litiges dont normalement il lui revient de juger.

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  • Gisèle Tordoir
    Gisèle Tordoir Le 27 décembre 2016 à 14:46

    Ce régime de transaction est plus que douteux dans le sens où la notion "justice pour les riches" interpelle et choque...C’est l’illustration voire la confirmation, s’il le fallait encore, que la justice fonctionne à plusieurs vitesses ; qu’il y a justice et justice, que tous ne sommes pas égaux devant la loi...Quel gâchis, quelle déception encore...Etat de droit, dit-on ???

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  • citi
    citi Le 27 décembre 2016 à 09:21

    tous les faits susceptibles d’être punis d’une peine maximale de 20 ans d’emprisonnement peuvent théoriquement donner lieu à une transaction pénale. C’est la première condition fixée.

    condition est que les faits en cause ne constituent pas une atteinte grave à l’intégrité physique. De simples coups et blessures sans circonstance aggravante paraissent ainsi permettre une transaction, tout comme un vaste carrousel tva ou tout délit financier qui, par définition, n’implique aucune agression physique.
    je n ai que faillit mourrir la balest passer a raz de la peau

    la belle crapulerie est quand tu sais quel juge ou quel condanation tu va avoir
    tu paye
    depuis lors, la transaction peut intervenir à tout stade de la procédure, alors que, précédemment, dès qu’un juge était saisi, la transaction était exclue.
    Ainsi, une transaction peut être conclue avec le parquet alors qu’une instruction est en cours, que le tribunal correctionnel est déjà saisi ou même en degré d’appel, après que le prévenu ait été déclaré coupable.

    et quoi qu il ce passe la majorite des cas ont eu 5ans pour regle le compte et le beau casier vierge
    et si sans revenus comme moi et bien d autre tu sera noirci de plus en plus cella te sera montrer meme pour un exes de vitess en velo devant un juge que te fera les reproche de ce casier dont profitera le procureur
    si j avais su payer je serais vierge nvoir primair a aureole

    c est pourris
    l’intérêt est de mettre un terme à des poursuites, à des conditions négociées et donc acceptées, sans que ne figure la moindre trace dans l’extrait de casier judiciaire.

    pour des fait bien plus grave et au bord des moeur aussi la personne avant moi elle pour 18500€ en sort comme si de rien
    mois pour ne pas l avoir fais ,jai 5000€ d amende et frais de justice et jene sais quoi d autres ,mais surtout un casier
    et comme toujours l avocat suivant me dira ho vous avez ete mal defendus

    par votre prodeo


    _

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Avocat au barreau de Bruxelles

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