L’huissier de justice : un acteur méconnu mais indispensable de la Justice

par Paul Coster - 25 août 2015

L’huissier de justice : chacun en a entendu parler mais qui le connaît vraiment ? Quelles sont ses fonctions, quel est son statut, quelles garanties offre-t-il au fonctionnement de la Justice ?

Paul Coster, lui-même huissier de justice et membre du comité de direction de la Chambre nationale des huissiers de justice, évoque son métier.

L’huissier de justice est un officier ministériel, c’est-à-dire un fonctionnaire public à statut hybride puisqu’il est indépendant sur le plan social, comme un avocat ou un médecin. Il est nommé par le Roi dans un arrondissement judiciaire déterminé au sein duquel il est tenu de poser ses actes (« instrumenter », dit-on dans le jargon).

Il est le lien privilégié entre le magistrat et le justiciable. Son rôle principal est d’introduire les actions devant les instances judiciaires et de poursuivre l’exécution des décisions rendues par celles-ci.

La loi lui attribue un monopole pour certaines matières, notamment pour l’exécution des titres exécutoires, c’est-à-dire des actes officiels sur la base desquels il peut contraindre une partie à exécuter ses obligations (contraintes, ordonnances, arrêts, jugements, etc.), ainsi que pour les constats, qui sont très diversifiés.

Il détient aussi des compétences résiduelles comme le recouvrement amiable de dettes.

Étant sur le terrain, au contact du justiciable, il voit et entend leur situation et est confronté au vécu parfois malheureux d’un débiteur et/ou de sa famille. Il joue le rôle de médiateur en étant le relais entre la partie débitrice et son créancier (généralement l’avocat qui le représente).

Le nombre d’huissiers de justice dans le royaume est fixé par arrêté royal. Il en va de même pour les candidats huissiers de justice, de futurs huissiers de justice qui remplissent toutes les conditions pour être nommés huissiers de justice sans toutefois l’être. Ils peuvent néanmoins remplacer un huissier de justice nommé moyennant certaines conditions.

Tous les huissiers de justice et les candidats huissiers de justice (voy. le site de l’association nationale des candidats et stagiaires huissiers de justice : www.nvksg) composent ensemble la chambre nationale des huissiers de justice (www.huissiersdejustice.be), dont les organes sont l’assemblée générale et le comité de direction. Les membres de l’assemblée générale sont élus au sein de chaque arrondissement proportionnellement au nombre d’huissiers de justice composant cette chambre. Elle adopte les différents règlements notamment en matière disciplinaire et d’ordre intérieur.

L’assemblée générale élit en son sein les membres du comité de direction.

Si nous établissons un parallèle avec l’organisation de l’État belge, l’assemblée générale remplit le rôle dévolu au Parlement et le comité de direction au Gouvernement.

En outre, chaque chambre d’arrondissement est administrée par un conseil, dont les membres sont élus chaque année par l’ensemble des huissiers de justice de l’arrondissement.

L’huissier de justice est soumis à une éthique professionnelle et une déontologie très strictes. Ainsi, le conseil de la chambre d’arrondissement et/ou le comité de direction est (sont) chargé(s) d’examiner les plaintes qui lui (leur) sont soumises. Celles-ci sont instruites par le rapporteur. Si le conseil estime qu’il y a lieu à sanction disciplinaire, le dossier est transmis au rapporteur national, qui en réfère au comité de direction, lequel peut transmettre le dossier à la commission de discipline. Il existe une commission disciplinaire dans chacun des cinq ressorts de cour d’appel. Elle est présidée par un magistrat. Les peines disciplinaires vont du rappel à l’ordre jusque la destitution.

La chambre nationale publie un rapport annuel reprenant la présentation de la profession et son profil actualisé ainsi que le baromètre économique et social du pays (www.huissiersdejustice.be).

Les huissiers de justice disposent notamment d’un statut qui leur est propre, d’un règlement d’ordre intérieur très précis et d’une méthode bien définie d’instruction disciplinaire.

Chaque huissier de justice est tenu de suivre l’évolution de la profession en suivant une formation dans le cadre d’une structure déterminée par le statut.

La chambre nationale a mis en place un centre d’expertise juridique et social pour les huissiers de justice dont le mot d’ordre est « travailler ensemble pour une société plus juste ». Son nom est « sam.tes », accessible à l’adresse suivante : www.huissiersdejustice.be/sam-tes.

Vous trouverez plus d’informations, notamment sur le statut, le mode de nomination, la discipline, et le rôle des différentes instances au sein de la profession dans les articles 509 à 555 du Code judiciaire.

Un livre intéressant sur l’évolution de la profession au travers les âges : Xavier Lesage, L’huissier - L’histoire de la fonction d’huissier de justice, 1993, Kalmthout, Éd. Pelckmans.

Mots-clés associés à cet article : Discipline, Déontologie, Huissier de justice, Citation, Exécution,

Votre point de vue

  • Tanguy
    Tanguy Le 29 août 2015 à 16:53

    Déposer un pli chez un débiteur coûte extrêmement cher sous le prétexte que la personne est assermentée.

    Pourquoi ne pas laisser la possibilité de faire déposer les plis par la police locale dont le moins gradé des agents est aussi assermenté ? Pas assez cher ?

    Répondre à ce message

  • Gisèle Tordoir
    Gisèle Tordoir Le 28 août 2015 à 14:26

    Au cours de la procédure judiciaire, toujours en cours d’ailleurs après 6 ans, nous avons dû faire intervenir, à plusieurs reprises, un huissier de justice, uniquement parce que la partie adverse, magistrats, mettaient non seulement en doute nos pièces jointes mais aussi et surtout nous accusaient de produire des fausses (truquées, retouchées ?) photos lors des différentes conclusions en tous genres déposées. Les huissiers ont fait des photos des mêmes lieux et ont donc déposé les mêmes photos que nous, sous l’angle de vue de leur choix personnel, bien sûr. Ces seules photos n’ont jamais été remises en question quant à leur validité. Est-ce concevable, acceptable, tolérable qu’il faille engager des dépenses supplémentaires à la procédure déjà coûteuse seulement pour prouver que nos pièces ne sont pas des faux ??? seulement pour ne pas se laisser traiter de menteurs, de tricheurs ??? seulement pour que le juge ait un autre son de cloche, un autre oeil, un autre rapport dont la teneur n’est pas remise en question du fait que l’huissier est assermenté alors que nous, simples citoyens ne sommes pas crus, pas pris au sérieux ??? La parole de tous n’a pas la même valeur visiblement...Pourquoi ? Pourquoi pour certains, la vexation et pour d’autres, la crédibilité ??? Dérive et/ou esprit corporatistes ?

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  • rexou
    rexou Le 27 août 2015 à 23:57

    Encore une chose : avant d’envisager de partager équitablement un gâteau, il faut penser à payer le gâteau.

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  • rexou
    rexou Le 27 août 2015 à 23:52

    Budget insuffisant ou manque de capacités de gérer son budget, ce sont de bonnes raisons pour ne pas payer ses dettes ??? C’est un raisonnement ahurissant !
    L’huissier intervient en dernier recours, lorsque toute conciliation a échoué. Le créancier doit avancer les frais... en espérant que son débiteur soit solvable.
    Polémiquer sur le montant des frais est un faux débat, et les huissiers respectent une grille de barèmes. Je ne suis pas huissier.
    Mais je suis victime de gens (locataires) qui se dispensent d’honorer leurs dettes avec toujours les meilleures raisons du monde.
    Un accident n’est jamais impossible. Dans ce cas, une attitude correcte, de la bonne volonté et un accord avec le créancier sont une solution. Mais le raisonnement que vous tenez pour justifier un non-paiement est simplement indécent.

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  • FrançoisP
    FrançoisP Le 27 août 2015 à 15:39

    Si un débiteur en difficulté n’est pas a même de payer une dette, pour de bonnes raisons (budget insuffisant), ou par manque de capacités de gérer son budget, ajouter des frais de huissier qui peuvent aller jusqu’à doubler voire plus la dette, ce n’est pas très intelligent, que ce soit d’un point de vue social, ou même du point de vue pragmatique du créancier...
    Les barèmes des huissiers n’ont pas été adaptés (à la baisse) avec la venue de l’informatique qui a diminué et rationalisé fortement les frais de secrétariat. Il serait logique que les usager en voient aussi la couleur au lieu de constituer un bénéfice de plus pour les huissiers.
    Sans polémiquer, on devrait aussi se poser la question du niveau de revenus générés par une étude de huissier : ces revenus sont-ils justifiés ou trop élevés ?
    Désolé de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, mais le partage équilibré d’un gâteau fait aussi partie des débats "de fond"...

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