La Cour des comptes
1. La Cour des comptes l’est une des institutions les plus anciennes du pays. Son existence est consacrée, depuis 1830, à l’article 180 de la Constitution, qui a été mis en exécution par la loi organique du 29 octobre 1846 ‘relative à l’organisation de la Cour des comptes’, plusieurs fois modifiée depuis.
2. Il s’agit d’un organe de contrôle indépendant du pouvoir exécutif. Il est qualifié de « collatéral » à la Chambre des représentants dans la mesure où son fonctionnement en dépend largement.
La Chambre nomme ses dix membres, une moitié néerlandophone et l’autre francophone, pour une durée de six ans renouvelable et les révoque. La Chambre fixe également son budget.
3. L’article 5 de la loi du 29 octobre 1846 précise les trois missions concrètes dévolues à la Cour : une mission de contrôle des recettes et dépenses, une mission juridictionnelle et une mission d’information.
La nature de ces missions a évolué au gré du temps et notamment de l’affirmation du fait fédéral. Désormais, elles concernent l’État fédéral, les Communautés, les Régions, les provinces ainsi que divers organismes d’intérêt public.
L’échelon communal est le seul niveau de pouvoir qui ne relève pas de la Cour des comptes.
4. La première mission a directement trait au rôle premier de la Cour, qui est d’assister les assemblées législatives dans le contrôle de l’exécution du budget mis en exécution par les Gouvernements.
Dans ce cadre, la Cour des comptes exerce un triple contrôle : un contrôle du respect des règles comptables et budgétaires, un contrôle du respect de la légalité et de la régularité des dépenses et recettes et un contrôle du bon emploi des deniers publics.
5. Elle exerce un contrôle a posteriori.
Le premier type de contrôle est systématique et vise à obtenir une certification des comptes des différentes entités. Les deux autres types de contrôle ne sont pas systématiques dans la mesure où ils ne visent pas l’intégralité des recettes ou dépenses. Ils sont généralement exercés par le biais d’audits portant sur une administration dans son ensemble, sur une législation particulière ou même un projet particulier. Ces audits sont menés d’initiative ou à la demande d’une assemblée parlementaire. Ils débouchent sur un rapport qui vise à identifier des irrégularités, des voies d’améliorations ou encore des recommandations.
6. Le rapport sur le Projet Métro 3, qui a été rédigé à l’initiative de la Cour, s’inscrit dans le cadre d’un contrôle exercé à l’égard de ce projet particulier. Comme révélé par la presse, il a permis d’identifier l’existence d’une série d’irrégularité en matière de marché publics, donnant lieu à l’ouverture d’une information judiciaire.
7. La mission juridictionnelle de la Cour porte sur le contentieux des fautes ou négligences graves ou des fautes légères répétitives qui seraient commises par les comptables publics.
Au moment où la Cour statue sur les comptes remis par les comptables publics, elle doit avertir l’administration concernée de l’existence d’un déficit causé par une éventuelle faute ou négligence. Cette administration dispose alors du choix de citer ou non son agent en remboursement devant la Cour. Lorsqu’elle s’en abstient, elle doit toutefois en aviser la Cour par un écrit motivé.
À l’issue d’une procédure judiciaire répondant aux règles du droit judiciaire, le comptable public est susceptible d’être condamné au remboursement du déficit auprès de son administration. Aucun appel n’est possible contre une telle condamnation. Seul un pourvoi en cassation est prévu.
8. Enfin, la mission d’information de la Cour est essentiellement prévue par l’article 54 de la loi du 22 mai 2003 ‘portant organisation du budget et de la comptabilité de l’État fédéral’, qui prévoit qu’elle transmet un rapport sur le projet de budget de l’État fédéral avant son vote par la Chambre. Ce rapport permet d’alimenter les débats parlementaires.
9. Par ailleurs, la Cour publie annuellement un cahier qui comprend les observations budgétaires ou financières qui ont été formulées par ses soins pendant l’année écoulée. Elle communique ce cahier aux membres des diverses assemblées parlementaires du pays.
L’OCRC
10. L’existence de l’OCRC n’est, à l’inverse de la Cour des comptes, pas consacrée institutionnellement. Il s’agit d’une unité spécialisée de la Police judiciaire fédérale crée pour lutter contre la corruption. Elle fait plus précisément partie de la Direction centrale de la lutte contre la criminalité grave et organisée (« DJSOC »).
Cette unité fait régulièrement l’actualité en raison de son intervention dans des dossiers sensibles, comme les affaires liées au Qatargate, au réseau des faux permis de conduire ou aux ingérences du Royaume du Maroc en Belgique.
11. Comme tout service de police judiciaire, l’OCRC n’agit jamais de sa propre initiative. Les enquêtes qui lui sont confiées sont toujours menées sous le contrôle du procureur du Roi ou d’un juge d’instruction, qui déterminent le cadre et les objectifs des informations ou instructions pénales concernées.
12. Les compétences qui sont les siennes ont trait, en général, à la corruption complexe et grave et, plus particulièrement, aux dossiers de fraude aux subsides, d’irrégularités dans le cadre de marchés publics, de prise illégale d’intérêt, de favoritisme, de détournement de fonds publics ou encore de fraudes dans le milieu du sport.
13. Les agents de l’OCRC sont reconnus pour leurs compétences et qualifications pour traiter ces catégories de dossiers particulièrement sensibles lorsqu’ils sont gérés au préjudice des intérêts de l’État et de ses citoyens.
Conclusion
14. Le projet Métro 3 illustre la complémentarité des missions de la Cour des comptes et de l’OCRC.
15. D’une part, la Cour examine à postériori la régularité, la légalité et la bonne gestion des derniers publics par nos mandataires ou agents publics. Elle agit en tant qu’organe de contrôle externe, indépendant, chargé notamment d’éclairer les assemblées législatives sur la mise en œuvre du budget par les Gouvernements. Dans ce cadre, elle est chargée d’identifier des irrégularités, des voies d’améliorations ou des recommandations.
16. D’autre part, l’OCRC intervient notamment lorsque les constats posés par la Cour ouvrent la porte à de potentielles infractions pénales.
L’OCRC enquête généralement sur l’existence ou non d’infractions extrêmement graves susceptibles de porter atteinte à la probité ou à l’intégrité de nos mandataires ou agents publics. Son rôle est alors de déterminer, toujours de concert avec un procureur du Roi ou un juge d’instruction, si les éventuelles irrégularités identifiées par la Cour sont constitutives d’infractions pénales.
Ainsi, les rapports de la Cour des comptes peuvent constituer, comme c’est le cas avec le projet Métro 3, une porte d’entrée pour l’ouverture d’une information judiciaire visant à déterminer l’existence d’éventuelles infractions pénales. Ces infractions, souvent indétectables en raison du caractère éminemment complexe et technique des matières concernées, doivent pourtant être identifiées pour garantir le respect de l’État de droit et préserver la confiance des citoyens envers leurs institutions.
17. Il est donc heureux que notre système institutionnel puisse compter sur l’action complémentaire d’une entité spécialisée, telle que la Cour des comptes et d’un service de police judiciaire spécifiquement dédié à ce type de contentieux.