Serions-nous prêts à acquitter Socrate si nous avions à le juger aujourd’hui ? Présentation de l’essai de François Ost, Le procès de Socrate

par Marc-Antoine Gavray - 24 septembre 2024

Ou bien le condamnerions-nous à mort, comme le firent les Athéniens en leur temps ? La réponse sonne comme une évidence : avec nous comme juges, celui que nous considérons comme l’un des fondateurs de la philosophie occidentale en sortirait au moins blanchi, pour ne pas dire glorifié, pour services rendus à l’humanité.
Qu’en penser ? Tel est le sujet de l’essai de François Ost, Le procès de Socrate, qui nous est ici présenté par Marc-Antoine Gavray, maître de recherche du FRS-FNRS et professeur associé à l’ULiège

Le procès de Socrate, François Ost

1. Au fond, grâce à Socrate justement, nous valons désormais mieux que ses contemporains qui décidèrent de sa mort.
La réalité semble pourtant plus complexe et il y a fort à parier qu’au-delà des déclarations, ce procès qui, à défaut d’être le premier de l’histoire occidentale, en est probablement l’un des plus retentissants, connaîtrait une issue similaire.

2. Pour nous faire vivre cette expérience de pensée et nous replacer dans les mêmes conditions que les juges de Socrate, François Ost nous plonge, le temps d’un récit, dans l’Athènes du tout début du quatrième siècle avant notre ère, au printemps 399.
S’inspirant des deux principaux témoins de ce procès quelque peu romancé (ou philosophé), Platon et Xénophon, il nous rappelle qui était Socrate (470-399), ce marginal qui philosophait en compagnie de quiconque retenait son attention sur la place du marché. Il nous dépeint son cercle de proches et de disciples, qui l’assistèrent jusqu’au bout et tentèrent en vain de le convaincre de se défendre, puis de s’enfuir une fois la sentence tombée.
Il nous évoque la teneur de leurs échanges, le refus de Socrate d’accorder trop d’importance à ses accusateurs et son soin à rester cohérent avec lui-même. Il nous expose enfin les chefs d’accusation et, par la bande, le fonctionnement des tribunaux athéniens, qui ne reposaient pas sur l’intervention d’un procureur mais agissaient à l’initiative d’un citoyen (trois en l’occurrence) et se prononçaient à la majorité des cinq cents juges tirés au sort – de simples citoyens, tout comme nous, pas mieux formés, pas plus instruits.
Jusqu’au bout, Socrate refuse de jouer le jeu de son procès. Jusqu’au bout, il provoque ses juges au lieu de les séduire, invoquant une mission divine en vertu de laquelle il se devait de les détourner de leurs évidences. Jusqu’au bout, il persiste à nier que ses attitudes hors normes aient pu les heurter ou, plutôt, à affirmer que ses attitudes hors normes visaient à les heurter et à les inciter à réfléchir.

3. Dans ce petit livre, François Ost nous dépeint combien Socrate était agaçant, intraitable, impossible à convaincre et hostile à tout compromis, agissant sans cesse tel un taon qui agite la foule, pour reprendre l’expression de Platon, et l’empêche de s’endormir sur ses certitudes.
Dans ces conditions, Socrate aurait-il vraiment plus de chance aujourd’hui de sortir vivant d’un tel procès ? Certainement. Mais que ce verdict ne nous dédouane pas de nous interroger sur le sort que nous réservons désormais aux empêcheurs de penser en rond et à tous ceux qui se permettent de mettre en cause nos vérités : combien nos sociétés modernes, avec leurs prétentions démocratiques et leurs outils technologiques, n’ont-elles pas développé d’instruments, bien plus « efficaces » que les tribunaux, pour se débarrasser des importuns ? Et cela sans leur laisser la moindre chance de devenir, comme Socrate, un événement dans l’Histoire.

François Ost, Le procès de Socrate, Bruxelles, Éditions Samsa, 2023, 82 p., 14 €

Mots-clés associés à cet article : Ost, François, Liberté d’expression, Peine de mort, Philosophie, Socrate,

Votre point de vue

  • Jacobs  Elsie
    Jacobs Elsie Le 27 septembre à 13:43

    Chere Marie-Christine,
    Pourriez-vous, s’il vous plaît, presenter les arguments factuels sur lesquels vous fondez votre diatribe ?
    A défaut, permettez-moi de refuter en bloc des allégations sans fondement si ce n´est les bla bla de dites "sociaux" qui ne font qu’attiser les qu’en dira-t-on.

    Répondre à ce message

  • TRIGALET Marie-Christine
    TRIGALET Marie-Christine Le 25 septembre à 14:12

    Pas sûre que Socrate n’aurait pas été condamné à notre époque....
    Vous vous faites beaucoup d’illusions sur votre "JUSTICE"

    Pourquoi la plupart des Belges et en particulier les VICTIMES lui attribuent-ils un ZERO POINTE ?????
    ’cf QR DEBAT RTBF) Pire encore que la police...
    Il n’y a que les coupables qui y trouvent leur compte. UN COMBLE !!!!!

    Je me bats contre le "système" de la ’justice belge" qui tente A TOUT PRIX d’OBTENIR le DESISTEMENT des VICTIMES afin qu’elles ne puissent jamais être indemnisées correctement...et c’est TOUT Le SYSTEME qui est corrompu, à de rares exceptions.

    ALors, le principe fondamental de la justice
    "Le DOMMAGE, rien que le dommage mais tout le dommage."
    Quelle IMPOSTURE TOTALE !!!!!
    Mensonges, menaces , tentatives de pertes de preuves et d’intimidation, tentatives de censures,...
    à tous les étages de la justice belge !!!!
    Dommage qu’on doive en passer par des RECOURS IMPAYABLES pour la plupart des citoyens et qu’on NE PUISSE PAS DIRECTEMENT ALLER au TRIBUNAL EUROPEEN pour pouvoir obtenir justice, cette justice galvaudée par ses principaux acteurs.

    La justice "belge" , quelle victime y croit encore ?????
    _

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