Un particulier surendetté peut-il demander au juge l’effacement de ses dettes ?

par Jérôme Martens - 17 août 2011

Un internaute faisant face à des difficultés financières s’est adressé à Justice-en-ligne pour l’éclairer sur une éventuelle « faillite privée » qui pourrait l’affecter, dans le contexte de la crise dite des subprimes qui a accru ses problèmes.

Justice-en-ligne n’ayant pas vocation à traiter des cas individuels, l’éclairage qui suit ne traite pas de cette situation particulière mais donne quelques indications sur les pouvoirs du tribunal du travail en cas de surendettement. C’est ce que l’on appelle le règlement collectif de dettes.

C’est Jérôme Martens, juge au Tribunal du travail de Bruxelles, qui nous offre ces explications.

Le règlement collectif de dettes a parfois été évoqué dans la presse comme étant « le bon plan ». La réalité est plus complexe car, si la loi protège le débiteur, elle lui impose d’importantes contraintes et n’ignore pas les intérêts des créanciers.

La loi permet à toute personne non commerçante qui n’arrive plus durablement à payer ses dettes d’introduire une demande de règlement collectif de dettes. Dans la requête, à envoyer au tribunal du travail, l’intéressé doit expliquer brièvement les raisons de son surendettement, mentionner toutes ses dettes et présenter une évaluation détaillée de son patrimoine et de ses revenus. L’origine des dettes n’a pas d’importance, il faut seulement que la personne ne tente pas frauduleusement d’échapper à ses créanciers. L’objectif de la loi est de lui permettre de payer ses dettes dans la mesure du possible, tout en continuant à mener une vie conforme à la dignité humaine. L’idée est de permettre un nouveau départ dans la vie après quelques années.

Lorsque la requête est admise, les procédures de saisie sont suspendues et les dettes cessent provisoirement de produire des intérêts de retard. Dès ce moment, le débiteur ne peut plus accomplir d’actes importants sur son patrimoine, sauf autorisation du juge. Il ne peut vendre un immeuble, faire un emprunt ou une dépense inhabituelle, etc.

Le rôle du médiateur de dettes

Le juge désigne un médiateur de dettes, qui percevra les revenus du débiteur et lui reversera chaque mois un montant lui permettant de vivre et de payer ses charges courantes. Ce montant ne peut descendre en dessous du revenu insaisissable qu’avec l’accord du débiteur, et il ne peut jamais descendre en dessous de celui du revenu d’intégration payé par les CPAS.

La mission du médiateur consiste à élaborer avec la personne un plan de remboursement amiable et à essayer d’obtenir l’accord des créanciers. Si ceux-ci sont tous d’accord, le plan sera soumis au juge pour être homologué, coulé dans un jugement ; s’il est impossible d’aboutir à un accord, le juge pourra imposer un plan de remboursement. Dans ce cas, la durée du plan est limitée à cinq ans maximum (pour un plan amiable, il n’y a pas de durée maximale).

Le médiateur de dettes peut être un avocat, un notaire, un CPAS ou un service de médiation agréé. Le médiateur de dettes est un mandataire de justice qui travaille sous le contrôle du juge. Il doit être neutre et impartial et veiller à l’équilibre entre les intérêts des créanciers et ceux du débiteur. Il n’a pas le rôle d’un avocat ni celui d’un assistant social. Le débiteur doit informer spontanément son médiateur de tout changement intervenu dans sa situation (déménagement, perte d’emploi, héritage, augmentation des revenus, etc.). Si le débiteur ne collabore pas à la procédure, dissimule des revenus, pose des actes interdits ou ne semble pas vouloir rembourser ses dettes au mieux de ses possibilités, le médiateur devra le signaler au juge, qui pourra prononcer la révocation, ce qui mettra fin à la procédure et permettra aux créanciers de reprendre leurs poursuites.

La procédure n’aboutit pas automatiquement à l’effacement des dettes

Le contenu du plan de remboursement varie en fonction de chaque situation individuelle. Il peut se limiter à accorder des délais de paiement ou à réduire ou supprimer les intérêts et les indemnités ou frais de retard. Si ces mesures ne suffisent pas, il peut aussi accorder une remise de dettes en capital mais à la condition que le débiteur accepte de vendre tous ses meubles et immeubles pour rembourser ses créanciers. Ce n’est que si l’insuffisance des revenus rend complètement impossible même à terme tout plan de remboursement qu’une remise totale de dettes peut être envisagée. Celle-ci peut être soumise à des conditions (par exemple, poursuivre activement la recherche d’un emploi, suivre une guidance budgétaire) et n’est définitivement acquise qu’en l’absence de retour à meilleure fortune dans les cinq ans du jugement.

Votre point de vue

  • Anne
    Anne Le 6 novembre 2014 à 11:21

    Je suis en règlement collectif de dette depuis le 01/08/2013 et... Je n’y vois que des avantages et aucun inconvénient ! Je gagne très correctement ma vie mais mon passif était trop élevé (30.000 euros) et divisé en un grand nombre de créanciers, ce qui devenait extrèmement difficile à gérer. J’aurai terminé de rembourser mes dettes et de payer le médiateur dans le courant de cette année. Je connaissais les implications de l’adhésion à ce règlement et j’en ai accepté et accepte toujours les implications douloureuses : je ne perçois pas mes revenus, mon employeur a été mis au courant de ma situation, je suis fichée à la Banque Nationale pour un an après la clôture du règlement par le juge... mais je suis heureuse de savoir que je vais me sortir des problèmes que j’avais moi-même créés et je vais sortir de ces soucis la tête haute, en sachant comment éviter les embûches financières que la vie met sur notre route. et pour la Banque Nationale, tant mieux ! jamais plus je ne ferai un prêt à la consommation, même pas pour une voiture. Je veux rester seule maître de mon budget. Voir les inconvénients comme des leçons, des messages de vigilance, c’est cela qui m’a permis d’ouvrir enfin les yeux sur ma mauvaise gestion d’un budget qui aurait dû me permettre de vivre très correctement.

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  • sabb
    sabb Le 23 septembre 2013 à 06:40

    j’ai été en médiations de dettes j’ai eu une 1er foi une dame qui savais ce quelle "faisais " la 2e fois une etudiante qui devais toujours aller demander quoi faire alors je me suis dis que si une etudiante pouvais m’aider je devais avoir le courage de la faire moi meme apres quelque annee que je regle mes huissiers ils se termine peu a peu sans devoir pour autant me priver de tout nous sortons petit a petit de se gouffre cette annee nous avons pu meme acheter une voiture et partir en vacance je pense que le secret n’est pas de voir le tout en noir mais de ce dire chaque jours demain ca ira mieux

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  • Bruno LABRIQUE
    Bruno LABRIQUE Le 12 février 2012 à 18:17

    Il convient de souligner que la situation du commerçant exercant en personne physique et ayant été déclaré en faillité est beaucoup plus enviable que celle d’un particulier surendetté puisque le failli, personne physique, bénéficie, en règle, de l’excusabilité.

    Grace à celle-ci, le failli excusable ne doit rien rembourser du tout des dettes admises au passif de la faillite et n’est donc soumis à aucune contrainte pendant plusieurs années pendant lesquelles il devrait observer un plan d’apurement portant sur des dettes certes réduites mais qui doivent tout de même être partiellement remboursées par le particulier à qui un règlement collectif de dettes est accordé.

    Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 4 septembre 2002, ce n’est plus au failli à qu’il incombe de prouver les circonstances qui justifieraient l’octroi de l’excusabilité, mais bien à l’opposant d’établir des "circonstances graves" qui justifieraient le refus de cette faveur visant à permettre au failli de recommencer le commerce ... (Ce qu’il fait évidemment, le plus souvent, tout en pouvant recommencer à ne pas honorer ses dettes sans que cela ne l’empêche de pouvoir ensuite bénéficer une seconde fois de l’excusabilité lors d’une nouvelle faillite utlérieure, le loi n’ayant pas prévu que cette faveur ne puisse être accordée qu’une seule fois ...).

    Certes, la failli doit être "malheureux et de bonne foi" mais la mauvaise foi ne se présume pas et il est bien malaisé pour un petit consommateur ou créancier particulier de faire la preuve de ce que son cocontractant failli aurait agi de manière le rendant définitivement non fiable comme partenaire commercial ... : il ne connait pas sa manière d’avoir organiser ses affaires commerciales, sa comptablité, ses prévsions sur risques et charges, son financement, ses obligations fiscales et sociales, etc ...

    Il ne peut donc, in concreto, faire la preuve de circonstances exceptionnellement graves qui justifieraient de s’écarter du principe de l’excusabilité du failli ...

    Tout cela amène d’ailleurs à s’interroger très sérieusement sur la fiabilité qu’il y a lieu d’attendre d’un commerçant agissant en qualité de personne physique et que la loi (ou la jurisprudence) protège de son manque de rigueur ou même d’honnêteté d’un point de vue financier (par le fait du renversement de la charge de la preuve) et encore, quant à la question de savoir s’il demeure actuellement vrai qu’il serait préférable d’agir en société pour préserver son patrimoine personnel et se protéger d’un éventuel réel échec commercial ou organisationnel survenu de bonne foi plutôt que d’exercer sous forme de société... (Les sociétés ne pouvant bénéficier de l’excusabilité).

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  • Fouarge J.
    Fouarge J. Le 17 août 2011 à 12:51

    Nous sommes dans le cas, depuis 2007, nos dettes sont pour l’onss, les contributions et les lois sociales en cause : nous n’avons pas été reconnus comme salariés par le tribunal du travail de Liège. En 92, nous avons travaillés pour la modique somme de 24.000 frs par mois pendant 6 mois..Si nous avions eu des dettes "normales" et pas de travail, je pense que le juge aurait été plus clément.. De plus, nous avons toujours honoré nos dettes, mais la situation s’empirant nous n’avons pas eu le choix. Encore deux ans... nous avons 56 ans ! Un travail pénible,notre santé défaillante et voilà...Une chance dans notre malheur, l’avocat est compréhensif mais nous avons notre fierté et l’impression de mendier notre argent. Deux vies anéanties voici mon témoignage.

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