Quel extravagant bidule que ce Palais Poelaert !
Édifié dans la réprobation du petit peuple des Marolles, utilisé dans la résignation par des justiciables et des avocats qui, égarés, s’y voyaient condamnés par défaut, détesté pour sa complication, sa démesure et son emphase, il a suffi qu’un jour on envisageât de le démolir ou, pire, de le « désacraliser », pour qu’on s’aperçût qu’on l’aimait, qu’on ne pouvait s’accommoder de la désublimation qu’impose à nos symboles le désenchantement postmoderne.
Quand on lui a infligé un échafaudage dont on pressent qu’il sera encore là le jour où le palais se sera effondré, on a compris que c’était plus qu’un tas de pierres rebelles, qui commençaient déjà de tomber toute seules, qui risquait de disparaître à jamais.
Alors, pour tenter de résister à la tyrannie des promoteurs, des gestionnaires et des caissiers, la Fondation Poelaerta décidé de s’adresser à ceux qui sont aux antipodes de l’utilitarisme ambiant : les artistes.
Avec cette liberté, cette fantaisie, cette poésie qui n’appartiennent qu’à eux, ils nous offrent 50 œuvres jubilatoires dans lesquelles le Palais se voit successivement virtualisé, embouteillé, bédéisé, sisyphié, playstationné, hyperchromatisé, végétalisé, animalisé, éléphantisé, futurisé, maritimé, paupérisé, détérioré, mythifié, popartisé, muséifié, selfisé, fuséifié, féminisé, érotisé, …
Merci, les artistes, pour ce merveilleux livre dont on espère que, tout autant que l’expression d’une nostalgie, il est la promesse d’une palingénésie (terme vulgaire synonyme d’apocatastase).