1. Risquez-vous une condamnation pénale si vous aidez votre voisin à se suicider, par exemple en lui passant les médicaments létaux qu’il prend lui-même, ou si vous restez chez lui pendant sa grève de la faim ?
Peu remarquée dans la vie quotidienne, et encore moins en raison des nombreuses questions posées par la Covid 19 et le confinement, l’assistance au suicide est un sujet vivement discuté par les chercheurs dans plusieurs domaines, notamment de la médecine, de l’éthique et de la religion.
En droit également, l’assistance au suicide est un sujet aussi discuté que controversé.
La Cour constitutionnelle fédérale allemande a rendu en février 2020 un important arrêt en la matière.
2. Dans sa décision du 26 février 2020 (Az. 2 BvR2347/15 ; 2 BvR 651/16 ; 2 BvR 1261/16), la Cour constitutionnelle fédérale allemande (Bundesverfassungsgericht) a jugé inconstitutionnel le § 217 StGB (Strafgesetzbuch, Code pénal allemand).
Selon ce § 217 StGB, était puni d’une amende ou de trois ans d’emprisonnement au maximum celui qui encourageait ou rendait réalisable le suicide d’une autre personne en lui donnant la possibilité de se suicider.
Cet article avait été introduit dans le Code pénal allemand il y a cinq ans par la loi du 3 décembre 2015 (BGBl. I S. 2177) dans le but d’éviter la commercialisation de l’assistance au suicide ainsi que de se prémunir du risque que des personnes vulnérables soient poussées vers le suicide assisté.
3. À ce stade, il est important de distinguer clairement l’assistance au suicide et l’euthanasie active.
Cette dernière nécessite un comportement actif de la part du médecin ou d’une autre personne, comme par exemple des membres des associations d’aide au suicide. L’euthanasie active peut alors constituer un homicide pour mettre fin aux souffrances d’une personne, ce qui en Allemagne peut être puni comme un meurtre (§ 212 StGB).
En revanche, l’assistance au suicide correspond à l’accompagnement de personnes désirant se suicider, éventuellement par la mise à disposition des médicaments ou plus largement des moyens létaux. C’est par là que les médecins, les associations d’assistance au suicide et des personnes désirant de se suicider ont déposé un recours devant la Cour constitutionnelle.
4. Outre le § 217 StGB déclaré inconstitutionnel, il existe toujours le § 216 StGB, selon lequel la contribution à la mort d’une personne est répréhensible même si elle souhaite mourir et punie par six mois à cinq ans d’emprisonnement. Tandis que § 216 vise la participation active à l’acte létal, le § 217 visait les seuls agissements préparatoires à un suicide.
5. Pour la Cour constitutionnelle, l’inconstitutionnalité du § 217 StGB résulte de ce que l’interdiction de contribuer au suicide des personnes rend impossible à ces personnes d’obtenir du soutien, ce qui méconnait plusieurs droits fondamentaux constitutionnels.
Dès lors qu’elle n’est pas contrainte, la décision de vouloir mourir est l’expression du droit à la personnalité et de la dignité humaine garantis par la Loi fondamentale, la Constitution allemande (Grundgesetz, article 2, alinéa 1er, et article 1er, alinéa 1er), même s’il s’agit de l’ultime expression de ces droits fondamentaux, parce que ces droits ne sont pas limités à certains stades de vie.
L’interdiction du § 217 StGB ne touchait pas seulement aux droits des personnes souhaitant mourir. Elle portait aussi atteinte à la liberté professionnelle des médecins et des associations d’aide au suicide garantie par l’article 12 de la Loi fondamentale ainsi qu’à la liberté associative de l’article 9 de la Loi fondamentale et à la liberté personnelle de l’article 2, alinéa 1er, de la Loi fondamentale (Allgemeine Handlungsfreiheit).
À cela s’ajoute que l’interdiction pure et simple contrevenait au principe de proportionnalité.
6. En raison de cette décision, le législateur allemand devra développer des critères pour encadrer l’assistance au suicide.
Pourrait-on, au regard des motifs d’inconstitutionnalité avancés, admettre l’existence d’un droit à un suicide assisté ?
Votre point de vue
Blanc 17 Le 2 mars 2021 à 18:30
Ce sont des personnes en "bonne santé " qui décident et qui parlent, qui ne souffrent pas , n’endurent pas un martyre quotidien. Que ces gens-là en bonne santé ne captent pas la parole , ils décident pas sans savoir sur un sujet dont ils ne savent rien ....! Ils auront tout le temps de changer d’avis lorsqu’ils seront eux-mêmes atteints, au stade ultime, en fin de vie... là alors, ils regretteront ce qu’ils auront eux-même décidé des années plus tôt..
L’hypocrisie bien pensante a bon dos, hélas
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Skoby Le 2 mars 2021 à 15:45
Je comprends parfaitement qu’on condamne l’assistance au suicide, mais pas d’interdire l’euthanasie de personnes souffrantes, qui non plus aucune espérance de guérison.
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