L’acte d’avocat : instrument de preuve
1. Le texte qui institue l’acte d’avocat est la loi du 29 avril 2013 ‘relative à l’acte sous seing privé contresigné par les avocats des parties’, entrée en vigueur le 13 juin 2013.
En application de cette nouvelle disposition, les avocats peuvent actuellement apposer leurs signatures sur des conventions privées signées entre parties afin de donner « pleine foi de l’écriture et de la signature des parties à l’acte tant à leur à leur égard qu’à l’égard de leurs héritiers ou ayants-cause » (article 2 de la loi du 29 avril 2013).
Outre l’objectif d’éviter certaines discussions quant à l’authenticité des signatures des parties — et, partant, de leur adhésion au contenu de l’acte ––, la loi prévoit également que, par sa signature, l’avocat atteste avoir pleinement éclairé la ou les parties qu’il conseille (article 3), chaque partie à l’acte ayant un intérêt distinct devant par ailleurs être assistée par un avocat différent (article 2).
L’acte d’avocat est dès lors « destiné à apporter plus de sécurité juridique et plus de prévisibilité dans l’exécution des conventions entre parties, avec souplesse et de façon relativement simple. En conséquence, l’acte d’avocat préviendra les conflits ultérieurs et contribuera ainsi à écarter un recours au tribunal. La lutte contre l’arriéré judiciaire n’en sera que facilitée. […] » (Sénat de Belgique, rapport fait le 27 mars 2013 au nom de la Commission de la Justice par M. Vastersavendts, Doc. parl., 2012-2013, n° 5 1936/3).
Il y a lieu par ailleurs de remarquer que le texte légal ne vise que « les parties » et ne s’applique dès lors qu’aux conventions bilatérales ou multilatérales. Ainsi, les nouvelles dispositions ne sont pas applicables aux actes unilatéraux (par exemple, un testament olographe).
L’acte d’avocat : un instrument souple de sauvegarde des droits
2. La seconde loi qui renforce le rôle de l’avocat hors du prétoire est la loi du 23 mai 2013 (entrée en vigueur le 11 juillet 2013), laquelle modifie l’article 2244 du Code civil.
Auparavant, seuls une citation en justice, un commandement ou une saisie, signifiés par un huissier de justice à la personne (physique ou morale) qu’une autre voulait empêcher de pouvoir revendiquer une prescription pour échapper à ses obligations, formaient ce que l’on appelle l’interruption civile de la prescription.
En effet, le temps qui s’écoule (le délai de prescription) a, dans de nombreux cas et suivant de multiples règles de procédure, pour conséquence de modifier une situation de fait en source de droits. La prescription acquisitive crée des droits dans le chef d’une personne (par exemple et à certaines conditions, un droit de propriété par possession continue), la prescription extinctive entraine quant à elle la perte d’un droit non exercé (par exemple la perte de recouvrement de loyers impayés ou de montants facturés impayés et non réclamé(e)s en justice pendant cinq ans).
Avant l’entrée en vigueur de la loi du 23 mai 2013, une partie devait bien souvent recourir à la citation en justice afin d’interrompre le délai de prescription et sauvegarder ainsi ses droits. En pratique, certains litiges étaient dès lors portés in extremis devant les tribunaux, ce qui entrainait un coût financier, donnait un caractère judiciaire à une situation qui aurait pu se régler en dehors de l’intervention des magistrats et surtout… participait également à augmenter l’arriéré judiciaire que nous connaissons aujourd’hui dans le Royaume et que bon nombre d’acteurs du monde judiciaire et politique, preuve en est par la concrétisation de « l’acte d’avocat », tente de résorber.
Depuis le 11 juillet 2013, la mise en demeure signée par un avocat envoyée à une personne (physique ou morale) dans le respect des règles de l’article 2244 du Code civil a notamment pour effet d’interrompre la prescription.
L’avocat peut dès lors préserver les droits de son client en évitant de judiciariser d’office le dossier de ce dernier.
Cette avancée législative est à saluer et pourra, espérons-le, réduire quelque peu l’encombrement de nos tribunaux, éviter le coût de certaines procédures inutiles et favoriser des solutions amiables entre parties (bien qu’un accord entre un débiteur et son créancier reste envisageable alors qu’une citation en justice a été signifiée).
Notons au passage que la nouvelle loi attribue, si les règles de l’article précité sont respectées, le même effet interruptif de la prescription à la mise en demeure envoyée par les huissiers de justice et, dans certains cas, par les délégués d’une organisation représentative d’ouvriers ou d’employés, par les délégués d’une organisation représentative d’indépendants, par certains fonctionnaires, par les membres effectifs d’un CPAS ou par un membre de son personnel délégué par celui-ci.
La modernisation de la profession d’avocat
3. Ces deux nouvelles lois s’inscrivent dans un courant de modernisation de la profession d’avocat et de son image, lequel se développe depuis plusieurs années.
Ce courant positif encourage chacun à consulter un avocat afin d’être utilement conseillé, que cela soit dans sa vie privée ou professionnelle, et ce, en l’absence de tout conflit, afin de comprendre les risques et les conséquences juridiques de l’acte qu’il souhaite poser.
L’acte d’avocat peut devenir un instrument intéressant s’il est (intelligemment) appliqué et développé. Pour renforcer son efficacité, celui-ci devrait en effet recouvrir d’autres domaines que ceux actuellement légiférés.
Votre point de vue
ROBAT Derieux Le 14 janvier 2018 à 08:37
À quel,prix est tarifé l’acte d’avocat ?
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Ced Le 7 octobre 2013 à 14:58
Me Heughebaert magnifie toujours ses articles de titres délicieux !
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Gisèle Tordoir Le 12 août 2013 à 13:35
Pourvu que tous les avocats comprennent bien ces nouvelles lois et maîtrisent suffisamment le sujet pour conseiller de façon efficace les personnes faisant appel à eux. Résorber l’arriéré judiciaire est certes un objectif à atteindre mais encore faut-il être sûr que ce soit bien fait...C’est probablement le cumul d’expériences judiciaires regrettables et injustement menées qui m’empêche toute sérénité et confiance par rapport à cette mesure qui, de loin semble pouvoir être une avancée dans la volonté d’améliorer le fonctionnement de la "justice" mais de loin seulement...Wait and see, voici mon impression...Bénéficier du bon conseil de son conseil est trop souvent une question de chance et ici je ne parle pas pour moi...mais pour tant d’autres...Il devrait être rendu "obligatoire" ou fortement encouragé, et ici j’entends mis financièrement à la portée de tous, de s’assurer en protection juridique car les frais d’avocat deviennent rapidement insupportables et découragent nombre d’entre nous à faire appel à un "conseil" car en effet "le conseilleur n’est pas le payeur"...Trop rapidement demander conseil devient trop cher...alors imaginez demander "justice" et réparation(s) ???...Il n’y a que certaines personnes qui ont droit à une batterie d’avocats médiatiques, soulevés par un soudain et spontané élan "humanitaire", favorables à des causes si éloignées de celles de la majorité d’entre nous...Nous, si nous ne pouvons payer, assurance à l’appui, nous n’avons droit à aucun intérêt de quel que conseil que ce soit. Alors l’avocat maître de ses actes, oui, mais aussi et surtout avec une vraie conscience.
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skoby Le 9 août 2013 à 14:07
Ceci me paraît tout-à-fait opportun pour résorber une partie de l’arrièré judiciaire.
Il faudra voir comment les avocats appliquent cette nouvelle loi, et comment de
leurs conseils ils parviendront à expliquer à leurs clients quand et comment utiliser cette nouvelle loi.
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