1. Une phase d’enquête (appelée instruction ou information selon qu’un juge d’instruction est en chargé ou pas) précède généralement tout procès pénal.
Au cours de cette phase, différents actes d’enquêtes sont accomplis afin de rechercher la vérité et de constituer le dossier qui sera ensuite soumis au juge dans le cadre du procès proprement dit.
Les actes d’enquêtes pouvant ainsi être accomplis sont généralement prévus par la loi, laquelle détermine les conditions dans lesquelles ils peuvent être effectués, et les règles qui doivent être respectées lors de leur mise en œuvre.
Le plus courant des ces devoirs d’enquête est sans doute l’audition de personnes, par exemple en qualité de suspect, de témoin ou de victime.
Les auditions peuvent être effectuées soit par des fonctionnaires de police, soit par un membre du parquet, soit encore par un juge d’instruction.
Les propos tenus par la personne entendue sont transcrits dans un procès-verbal, versé au dossier ; il pourra être retenu comme élément de preuve lors du procès.
2. Ce devoir d’enquête peut paraître fort simple, mais pendant longtemps il n’a été soumis à aucune règle précise.
Il n’est pourtant pas rare que des personnes contestent a posteriori avoir tenus les propos (ou certains des propos) qui leur sont prêtés, ou affirment que ces propos ne reflètent pas la réalité et ont été tenus soit par crainte ou à la suite de pressions (ou parfois des violences physiques) qui auraient été exercées par les personnes procédant à l’audition, soit en vue d’en finir avec un interrogatoire qui se serait anormalement prolongé, etc.
3. En vue notamment de remédier à cette situation, et pour offrir à la personne entendue davantage de garanties destinées à renforcer la fiabilité de son procès-verbal d’audition et le contrôle par cette personne du contenu de sa déclaration, une loi de 1998 de réforme de la procédure pénale a fixé certaines règles à respecter lors de toute audition. Les principales sont les suivantes : la personne doit être informée, préalablement à toute audition, de certains droits dont elle dispose, l’heure de début et de fin d’audition doit être indiquée sur le procès-verbal, avec l’identité des personnes présentes, le procès-verbal doit être lu à la personne en fin d’audition, une copie de celui-ci doit lui être remise.
4. A la différence de ce qui est prévu dans de nombreux pays, la loi belge ne prévoit toutefois pas le droit pour une personne d’exiger la présence de son avocat lors de son audition.
Par conséquent, en Belgique, actuellement, les auditions se déroulent, sauf exceptions rarissime, en dehors de la présence d’un avocat.
5. Cette situation risque de devoir être revue prochainement, en raison notamment de l’évolution récente de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Dans un arrêt du 27 novembre 2008, la Cour européenne des droits de l’homme a en effet considéré qu’il y avait eu violation du droit à un procès équitable en raison du fait qu’une personne (ultérieurement condamnée) n’avait pas pu se faire assister d’un avocat pendant sa garde à vue et lors de ses auditions par la police et le juge d’instruction. Cet arrêt a par la suite été confirmé par d’autres décisions également rendues en ce sens par la Cour européenne.
Dans cet arrêt, la Cour a notamment considéré qu’il « faut en règle générale que l’accès à un avocat soit consenti dès le premier interrogatoire d’un suspect par la police, sauf à démontrer, à la lumière de circonstance particulière de l’espèce, qu’il existe des raisons impérieuse de restreindre ce droit ».
6. Même si aucun arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme n’a encore été rendu sur ce point en ce qui concerne la Belgique, il semble donc découler de cette jurisprudence que la règle devra à l’avenir consister en la possibilité pour la personne entendue de se faire assister d’un avocat et qu’il ne pourra être fait exception à cette règle que dans des cas particuliers, en raisons de circonstances spéciales dont il faudra pouvoir justifier la prise en considération.
Une évolution de la loi belge en ce sens semble devoir intervenir, sans quoi la Belgique pourrait à son tour être condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme.
Elle permettrait en outre de mettre fin à la « suspicion » qui règne parfois sur la manière dont certaines auditions se seraient déroulées, spécialement dans des dossiers sensibles