La condamnation de Marine Le Pen
1. Le 31 mars 2025, le Tribunal correctionnel de Paris a reconnu Marine Le Pen coupable de détournement de fonds publics dans l’affaire dite des assistants parlementaires du Rassemblement national. Elle a été condamnée à quatre ans d’emprisonnement, dont deux ferme, à 100.000 € d’amende, ainsi qu’à cinq ans d’inéligibilité. Ce jugement a été présenté le 12 mai dernier sur Justice-en-ligne par Michael Koskas (« Justice et politique : ce que révèle le procès de Marine Le Pen »).
Le 1er avril 2025, Marine Le Pen fit appel de ce jugement devant la Cour d’appel de Paris. Ce recours n’est pas encore jugé et devrait l’être en 2026, soit avant la date prévue des prochaines élections présidentielles de 2027.
L’une des particularités du jugement consistait en ce que la peine d’inéligibilité était assortie de l’exécution provisoire, ce qui veut dire qu’elle s’applique immédiatement malgré l’appel interjeté, alors qu’en principe, sauf si le juge en décide autrement, un recours est suspensif de l’exécution de la condamnation. En conséquence, à ce stade, Marine Le Pen est dans l’incapacité de se porter candidate à l’élection présidentielle de 2027, sauf si la Cour d’appel devait ne pas confirmer cette peine d’inéligibilité.
Le recours à Strasbourg de Marine Le Pen - Le rejet de la demande de mesure provisoire
2. Après avoir introduit devant la Cour européenne des droits de l’homme un recours contre la France parce que, selon elle, ce jugement aurait violé certains des droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme, Marine Le Pen, dans le cadre de cette procédure, a demandé à la Cour de prononcer une mesure provisoire en ce qui concerne l’exécution provisoire de la condamnation d’inéligibilité prononcée à son encontre : elle souhaitait par cette demande que la Cour suspende le caractère exécutoire de cette condamnation. Autrement dit, elle demandait de considérer que cette condamnation était suspendue pendant la durée de la procédure d’appel qu’elle a introduite contre celle-ci.
3. À l’appui de sa demande de mesure provisoire, elle fit valoir que la peine d’inéligibilité prononcée à son encontre en première instance et ses modalités l’exposaient à un risque imminent d’atteinte irréparable aux droits garantis par l’article 3 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des droits de l’homme, qui proclame le droit à des élections libres.
4. Par une décision du 9 juillet 2025, à l’unanimité des sept juges composant la chambre à laquelle l’affaire a été attribuée, la Cour européenne des droits de l’homme a rejeté la demande de Marine Le Pen : la Cour considère qu’en tout état de cause l’existence d’un risque imminent d’atteinte irréparable à l’un des droits protégés par la Convention et ses protocoles n’est pas établie. En conséquence, elle décide de ne pas indiquer au Gouvernement français la mesure sollicitée par elle.
Il en résulte que la peine d’inéligibilité de Marine Le Pen reste exécutoire et doit être appliquée tant que l’appel qu’elle a introduit contre le jugement prononçant cette peine n’a pas été jugé, ce qui, selon les médias, devrait intervenir en 2026.
Quelques informations supplémentaires
5. Pour en savoir plus sur le mécanisme des mesures provisoires pouvant être prononcées par la Cour européenne des droits de l’homme, on consultera les explications à lire dans l’article suivant publié sur Justice-en-ligne : Philippe Frumer, « La Cour européenne des droits de l’homme indique au gouvernement russe une mesure provisoire concernant Aleksey Navalnyy : quelle en est la portée ? ».
Et sur les cas dans lesquels, en droit belge, une condamnation pénale peut, par exception à la règle du caractère suspensif des recours, être déclarée exécutoire malgré l’appel introduit contre elle : Laurent Kennes, « Le caractère suspensif des appels en procédure pénale : quelle règle générale et quelles exceptions ? ».